24 octobre 2008
La colère rend aveugle …
… mais elle finit toujours par retomber.
Hier soir, je fustigeais mon incapacité technique, mes maladresses. Mais ce matin, je vois les choses autrement.
Ce portrait ne me pose pas tant un problème technique qu’un problème émotif, affectif.
Il y a longtemps, un ami m’a dit que je me cachais derrière mes sujets. Il est vrai que lorsque je dessine des bâtiments, réels ou même imaginaires, je ne suis pas dans le registre de l’émotion, je n’y mets rien de moi. Au mieux, je peux inviter à l’imagination, à la rêverie, si j’arrive à créer une ambiance. Au pire, je fais du documentaire, de la botanique voire de la décoration.
Je pense que cette démarche, même si je ne la renie pas et que je pense continuer aussi dans cette voie, me donne des bouffées anesthésiques, du repos, du calme. C’est peut-être mieux que de prendre des médocs !
Mais voilà , ça ne me suffit pas, j’ai aussi besoin d’autre chose. Et le « autre chose » se situe dans le registre de l’émotion.
Hier soir, lors de l’exécution du dessin, j’étais prise entre deux émotions violentes et contradictoires :
- la volonté de me montrer, de séduire
- le dégoût de me voir et de ne pas trouver grand-chose qui me plaise
Je pense que le résultat trahit ce conflit intérieur.
Au-delà du résultat, j’étais très perturbée par cette émotion présente dans chacun de mes gestes. Je n’ai pas l’habitude de cela, et je n’ai pas trouvé cela particulièrement agréable pour être honnête. Je ne savais quoi « en faire » ni comment transposer cela dans le dessin. Je ne suis pas ressortie de cette séance particulièrement calme et sereine.
Néanmoins, j’ai réalisé que cette démarche basée sur l’expression émotive m’était nécessaire et qu’elle ne pouvait s’appuyer que sur des sujets qui me sont très personnels (allez faire passer une émotion avec une fenêtre renaissance ou un arc roman vous …)
Ce constat me renvoie donc à un autre constat fait il y a quelques mois : le besoin très fort de séduire et par ce biais de rentrer en contact avec les autres. D’où le choix de cet autoportrait.
Je pense qu’il y en aura d’autres, car en parallèle, cela m’amène à des questionnements sur ma vraie personnalité, sur ce que j’en montre ou pas, sur la façon dont je me vois et les autres me voient.
Je ne sais pas où cela va m’emmener car pour l’instant, je me suis limitée au visage. Mais le corps a aussi toute son importance (et soyons honnête me pose encore des problèmes).
Voilà , cette réflexion me ramène au texte d’Isabelle Filliozat sur la maturité affective :
« La maturité affective est atteinte lorsque l’Homme sort de l’égocentrisme et devient capable d’altruisme. En fait, on ne passe pas directement de l’un à l’autre. Trois stades précèdent l’altruisme dans cette évolution : l’égocentrisme, l’égoïsme, l’égotisme.
L’égocentrisme : se prendre pour centre. L’égocentrique voit en fonction de lui-même. Il ne sait pas se détacher de son point de vue. Le monde est un prolongement de lui, les autres n’existent qu’en tant qu’objets. L’égocentrique est incapable d’empathie.[…]
Le pas suivant dans le développement vers la maturité émotionnelle et sociale est l’égoïsme. L’égoïste a davantage de conscience de lui-même que l’égocentrique. En fait, l’égoïsme est justement l’attitude qui permet d’établir des limites entre soi et autrui.[…]
L’égotisme est une étape de construction de son individualité. Qui suis-je ? Quelles sont mes valeurs ? Après s’être différenciée par l’égoïsme, la personne veut se trouver. L’égotiste, dit aussi narcissique, ne se préoccupe tout simplement pas d’autrui.[…]Il se cherche à l’intérieur de lui.
En haut de l’escalier, l’étape de la maturité est caractérisée par l’altruisme. Un altruisme n’est pas une négation de soi, mais au contraire un élargissement de la conscience de soi, jusqu’à y intégrer autrui.[…]L’altruiste s’aime et se respecte suffisamment pour ne jamais accomplir un acte qui n’aille pas dans le sens de son estime de lui-même. »
Et bravo aux courageux qui ont lu jusque là 🙂